Intérêt de la préparation physique pour le compétiteur de Ball Trap

A priori, il peut sembler surprenant de parler d’athlète pour qualifier un tireur de haut niveau.
Pourtant, si l’on se réfère à certains participants aux disciplines olympiques de tir, ce terme d’athlète trouve toute sa justification.

On peut citer par exemple, lors des Jeux Olympiques d’Athènes en 2004, le cas des italiens Andrea BENELLI (médaille d’or au skeet à 44 ans) et Giovanni PELLIELO (médaille d’argent à la fosse olympique) qui ne cachent pas l’importance pour eux d’un véritable programme de préparation physique, régulière et encadrée, pour accomplir ce type de performances.

En France, nul doute que le prestigieux palmarès de Michel CARREGA illustre parfaitement la complémentarité souhaitable entre le tir de haut niveau et la pratique d’activités physiques et sportives.

1 - Justification de l’activité physique

Les tireurs de ball-trap n’ont pas en général la réputation d’être des sportifs accomplis, encore moins des athlètes, et il est vrai que nombre d’entre eux réalisent des performances en l’absence de tout programme d’entrainement physique.
Cependant, on sait depuis longtemps que la condition physique et la force musculaire jouent un rôle essentiel dans les aspects physiques et psychologiques de tous les sports, et il faut admettre qu’il en est ainsi pour ce qui concerne le ball-trap.

Ce sport requiert une aisance et une rapidité de mouvement, qui ne peuvent être obtenues sans un positionnement le plus efficace possible, biomécaniquement, de l’ensemble des muscles et des articulations sollicités.


Le tireur effectue de nombreux gestes répétitifs de soulèvement, épaulement, déplacement et abaissement de son arme, dont le poids est levé et mobilisé des centaines de fois. Le recul imposé par le tir au niveau de l’épaule et du cou fatigue les groupes musculaires sur lesquels il s’exerce, et qui doivent absorber cette énergie.


La longueur de certaines compétitions, parfois prolongées par des épreuves de barrages, provoque une fatigue musculaire générale non négligeable, bien que variable selon les disciplines pratiquées.


Devant toutes ces contraintes, on doit donc reconnaître que l’entrainement sportif et la recherche d’une bonne condition physique peuvent bien sûr apporter un bénéfice évident au niveau des performances de tir.


2 - Bienfaits principaux de l’activité physique

En dehors des effets favorables sur l’état de santé en général, l’exercice physique peut procurer trois types de bénéfices dans la pratique du Ball Trap :

Améliorer la tenue de l’arme et le mouvement de "swing"

L’entretien musculaire général augmente la capacité à maintenir fermement le poids du fusil, et à le déplacer de façon souple et fluide, mais si besoin agressive, vers la cible mobile. Il apporte une position d’attente plus détendue, mais aussi un temps de réaction plus rapide.

Aider à mieux résister à la fatigue en acquérant de l’endurance

La pratique de sports d’endurance (avec un effort aérobie) comme la course, le jogging, la natation ou le vélo, améliore l’efficacité du système cardio-vasculaire et respiratoire. Cela permet d’être moins perturbé par la fatigue générale engendrée par les longues compétitions, ou même par les séances d’entrainement au tir, beaucoup plus productives lorsqu’elles sont moins éprouvantes physiquement.

Développer mentalement une attitude et une psychologie positives

Le tireur qui investit du temps et de l’énergie dans une préparation physique complémentaire, tout cela avec des objectifs précis, se sent obligatoirement mieux disposé et plus confiant en lui.
Ce climat psychologique favorable, mérité grâce aux efforts consentis, lui renvoie une meilleure image de lui-même, indispensable à l’acquisition d’un mental de gagnant.

D’autres effets positifs intéressants sont à attendre de la pratique d’une activité physique régulière :

  • aider à maintenir son poids idéal
  • renforcer les muscles et donner davantage d’énergie
  • développer la faculté de relaxation
  • combattre l’anxiété et mieux gérer le stress
  • améliorer la qualité du sommeil


3 - Modalités de cette activité

L’entrainement physique et sportif doit être envisagé comme une activité parallèle, complémentaire, susceptible de procurer des avantages significatifs moyennant un investissement modéré en temps.

Cette activité ne doit en aucun cas remplacer partiellement la pratique du tir, ni empiéter sur le programme dévolu aux entraînements de tir, et on peut privilégier les intersaisons sportives pour y consacrer davantage de temps.


Les meilleurs résultats sont obtenus au prix d’un entrainement physique régulier, car l’absence d’exercice provoque la fonte musculaire, et il faut savoir que l’endurance se perd trois fois plus vite qu’elle ne se gagne.
Il faut cependant éviter toute fatigue sportive trop rapprochée d’une compétition importante.


Un programme d’entraînement physique doit être varié pour éviter la lassitude et la saturation, et il peut bien sûr alterner des exercices purement musculaires (travail avec des poids et haltères) et des exercices d’endurance (course à pied par exemple).

La montée en puissance doit rester très progressive (modifiant la durée de l’effort, la longueur de la course, la répétition des mouvements, l’augmentation des poids soulevés), mais elle est indispensable à l’obtention de résultats répondant aux objectifs fixés.

Les types de sports permettant d’améliorer la respiration et la fonction cardio-vasculaire sont bien connus : marche, jogging, natation, vélo.
Les exercices recommandés pour acquérir davantage de force et d’endurance musculaire, ainsi qu’une résistance accrue des os, tendons et ligaments, sont plus spécifiques.


Dans la pratique du ball-trap, les tireurs n’utilisent qu’une part minoritaire de leur force pour se déplacer, marcher et se tenir debout.


La force musculaire est surtout utilisée pour manipuler, soulever et balancer le fusil, et également pour s’opposer et résister au recul. Un programme complet de mise en forme utilise idéalement la totalité des muscles de l’organisme, mais on peut se contenter ici de chercher à développer les muscles les plus sollicités, qui sont d’ailleurs beaucoup plus nombreux dans le ball-trap que dans le tir à la cible ou même le tir à l’arc.

 

Il serait trop long et trop complexe de décrire les mouvements d’entrainement recommandés pour chaque muscle, mais il est intéressant de connaître les principaux muscles mis en jeu, et qui devraient être privilégiés dans un programme spécifique, si possible encadré par un moniteur compétent :

Les muscles du cou (avant et arrière) : positionnent et maintiennent la tête en avant et contre la crosse.

Les trapèzes : assistent les épaules dans la montée du fusil.

Les deltoïdes : soulèvent et maintiennent l’arme à une certaine hauteur (position d’attente).

Les triceps : étendent les bras lors de la montée de l’arme.

Les biceps : fléchissent les avant-bras et retiennent l’arme contre l’épaule.

Les fléchisseurs et extenseurs des poignets : supportent le poids du fusil et assurent la préhension de la crosse.

Les pectoraux : subissent une partie du recul (talon de la crosse).

Les dorsaux : descendent l’arme après le tir.

Les abdominaux : maintiennent le tronc en position de tir (penché en avant).

Les muscles lombaires : stabilisent et verrouillent le dos et la charnière lombo-sacrée.

Les quadriceps : supportent le poids du corps (tonus musculaire des cuisses), surtout lors du tir avec les genoux fléchis.

4 - Conclusion

La recherche d’une condition physique optimale, par la pratique d’un entraînement sportif et musculaire régulier, est certainement importante pour un tireur de haut niveau qui veut atteindre son potentiel maximal.

Si la résistance physique peut devenir un atout primordial pour le tireur en quête de performances individuelles, la force globale d’une équipe aspirant à un résultat collectif dépend aussi, bien sûr, de la force de chacun de ses éléments.

L’expérience des compétitions étalées sur plusieurs jours, avec le stress engendré, la fatigue du déplacement et les aléas climatiques, démontre bien que certains tireurs éprouvent parfois une baisse de forme physique assez subite, un "passage à vide" transitoire, qui compromet souvent tout espoir de performance finale.

Beaucoup de grands champions sont naturellement doués et consacrent un temps suffisant à l’entrainement au tir, mais la différence au plus haut niveau peut se faire sur d’autres facteurs annexes et l’entretien d’une bonne forme physique et musculaire n’est qu’un de ces facteurs, parmi d’autres comme l’hygiène de vie générale, l’équilibre alimentaire, le souci d’un repos et d’un sommeil suffisants, et la préparation psychologique.


Tout cet ensemble contribue au succès et à la réussite, mais il est bien évidemment difficile de chiffrer la seule part imputable à la force musculaire et à l’endurance physique.


Selon un coach américain bien connu (T. Migdalski, « The complete book of shotgunning games »), elle ne serait peut-être que de 5%, ce qui parait bien mince, mais sûrement pas négligeable : en effet, quel grand champion peut s’offrir le luxe d’accepter d’avance de rater 5% des plateaux qu’il tire ?


Dr Marc Vouaux, médecin fédéral national

(Revue « Ball-Trap », trimestriel N°10, février 2005)